Les composantes du projet
Le projet d’Équipollence s’adresse à toute personne porteuse de handicap quel que soit ce handicap et quelles que soient ses évolutions. Équipollence doit répondre aux exigences suivantes :
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permettre à la personne en situation de handicap de développer sa capacité à exercer le contrôle de sa vie, à pouvoir faire des choix dans le quotidien, à participer aux décisions qui la concernent ;
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lui permettre de développer ses potentialités et son autonomie par la constitution d'un réseau social au sein duquel elle pourra s’insérer et interagir avec différents acteurs de la vie sociale et économique du territoire dans une diversité de situations qui concourent à ce développement ;
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lui apporter l'aide et l'accompagnement nécessaires à la réalisation de ces objectifs par le biais de dispositifs élaborés autour de son parcours de vie personnel.
La formule proposée par le projet est celle d’un habitat partagé et accompagné. Il héberge 6 habitants en colocation dans un logement adapté offrant des espaces communs et privatifs. Il est inséré dans un ensemble immobilier doté de terrain, d'une gande maison pouvant être louée et d'autres locaux, l'ensemble devant produire une utilité sociale tant envers l'habitat lui-même qu'envers son territoired'implantation.
L’accompagnement de chaque habitant réalisé par le personnel d'accompagnemeny assure le suivi des gestes quotidiens et veille à la mise en œuvre, en liaison avec les partenaires respectifs, de la réalisation de son parcours de vie et de sa participation à la vie sociale et locale.
Prendre en compte la personne dans sa réalité c'est prendre en compte le territoire au sein duquel elle habite et au sein duquel elle va réaliser son parcours de vie et développer ses potentialités en mobilisant et en reliant des acteurs pour faciliter, améliorer et compenser une situation de déficience.
Cette mise en lien des acteurs du territoire se concrétise par le développement d'un réseau de partenaires œuvrant de façon concertée dans des secteurs différenciés tels que santé, social, économique, culture, logement, transports... Leur coopération permet d’apporter une réponse modulaire et évolutive au projet d’existence de la personne en lui permettant de participer à la vie sociale et économique du territoire.
Équipollence est un projet de décloisonnement et de mise en réseau pour améliorer la vie de personnes en situation de handicap. En proposant à ces personnes un habitat et un accompagnement partagés, il s'agit de leur permettre de participer à l’environnement humain, culturel, social et économique de leur territoire de résidence.
Cela nécessite de façon impérieuse d’inscrire l’habitat dans son territoire et de pouvoir mobiliser l'expertise et les compétences implantées sur ce territoire de vie. La maison utilisera autant qu'il sera possible les services et ressources de son environnement (médical, sanitaire, social, loisirs, culture, sport, vie sociale, économie).
Rechercher, identifier, associer, mobiliser et utiliser les compétences locales pour tisser un réseau partenarial auquel pourront accéder les personnes handicapées, cela consiste à développer un écosystème local offrant un cadre de vie, d’échanges et d’existence au sein duquel ces personnes auront la possibilité de développer et de déployer, à leur mesure, leur autonomie.
Cet écosystème est vivant, dynamique et coopératif : les différents acteurs, dont Équipollence, interagissent, se coordonnent et coopèrent de manière à construire et apporter aux personnes accompagnées les services et l’environnement assurant leur participation à la vie sociale. L’existence des personnes accompagnées se nourrit ainsi des ressources apportées par l’écosystème qui contribue à leur accompagnement.
En retour et à leur mesure elles nourrissent et enrichissent également cet écosystème de leur apport et de l’utilité sociale développée par Équipollence. Les échanges qui réunissent Équipollence à l’écosystème sont de l’ordre de la symbiose. La mise en œuvre du projet Équipollence au sein de son territoire d’implantation relève ainsi d’une forme d’économie symbiotique.
Le traitement des personnes handicapées, surtout des plus fragiles, dépend en premier lieu de notre façon de penser le handicap, et donc de notre culture. Car nous pensons en termes de norme. La norme institue la différence qui permet la classification. Une fois la classification opérée, chacun se voit assigné une place tenant compte de sa différence et de sa spécificité en un lieu spécialement conçu pour cela. Peut alors s’appliquer un traitement (de vie) adapté qui maintient l’ordre. Un ordre fondamentalement bâti sur l’exclusion.
S’affranchir de ces mécanismes d’exclusion nécessite d’adopter un point de vue radicalement contraire et de se placer dans une acceptation collective du tragique et dans un consentement au devenir aussi précaire et fragile qu’il puisse se révéler. Cette perspective exclut toute norme car l’existence se voit d’emblée acceptée dans sa mouvance, son évolution et sa diversité. La différence ne peut être invoquée. Seul existe l’humain dans la diversité évolutive des formes qu’il peut revêtir. Jamais différent : toujours semblable. Cette similitude prend le visage de figures plurielles et en devenir au sein d’une biodiversité de l’humain. Le terme « handicapé » perd ici son sens dans la mesure où n’existent plus que des personnes confrontées à des déficiences diverses et évolutives, toutes participant néanmoins au patrimoine commun. Le défi pour la cité n’est donc ni d’accepter ni de gérer la différence mais au contraire d’accepter et de gérer la similitude dans la multiplicité de ses déclinaisons possibles et d’organiser l'espace social de manière à le rendre accessible à chacune d’elles.
L’ambigu, le bizarre et les contradictions font partie intégrante de l’humain. Le changement consiste à appréhender la diversité des comportements, des capacités et des compétences non comme des différences mais comme de multiples figures de l’humain dans l’espace de sa biodiversité : plus de différences d’être mais seulement des écarts entre humains diversement situés dans cet espace. L’écart fait apparaître l’« entre » au sein duquel compréhension, discernement et observation amènent à trouver du commun. Produire du commun partagé à partir de la diversité voilà l'enjeu pour un exercice renouvelé de la citoyenneté.
C'est pourquoi Équipollence immerge son projet d'habitat partagé et accompagné dans un tiers-lieu plus large ouvert sur la vie locale du territoire. Ce tiers-lieu veut être un instrument d'apprentissage de l'exercice de cette citoyenneté renouvelée. Le terrain et les locaux qui entourent cet habitat constituent autant d'outils et de moyens concrerts et physiques mis à la disposition d'acteurs du territoire pour aprrendre à faire ensemble et à produire du commun, pour susciter et construire des initiatives collectives, pour tisser des liens et renforcer ainsi notre biodiversité sociale. L'habitat partagé et accompagné et ses colocataires se trouvent ainsi plongés dans un bain permanent de vie sociale et locale.